Cladiaie tourbeuse* (7210*)

INTITULE OFFICIEL DE L’HABITAT :

Marais calcaires à Cladium mariscus et espèces du Caricion davallianae (code 7210*)



La Cladiaie tourbeuse du marais de l'Anglade (photo : J. Terrisse)

 

STATUT

Au niveau européen

  • Habitat menacé prioritaire (Annexe I de la Directive Habitats, code 7210*)

 

En région Poitou-Charentes

  • Valeur patrimoniale régionale :
  • Niveau de Rareté :
  • Niveau de Menaces : 

 

REPARTITION

  • Sur le site : Marais de l'Anglade : avec près de 70 hectares, c'est {{la plus importante à l'heure actuelle de toute la région Poitou-Charentes}}. Elle y occupe, sous différents faciès, une grande partie de la cuvette. En dehors du marais de l'Anglade, la cladiaie existe aussi dans le secteur voisin du Marais des Breuils mais sous forme relictuelle : angles de parcelles abandonnées, linéaires le long des fossés. Voir la carte de répartition
  • Sur les autres sites Natura 2000 français : CARTE  (source : fiche du Cahier d’habitats)

 

 

PHYSIONOMIE-ECOLOGIE

L'habitat est floristiquement caractérisé et physionomiquement dominé par le Marisque Cladium mariscus - localement appelé "rouche", une grande Cypéracée pouvant atteindre 3 mètres de hauteur aux feuilles à marges coupantes, munie d'une souche traçante aux rhizomes peu profonds exploitant les 30cm supérieurs du sol.

La cladiaie a la structure d'une roselière haute de 2m environ, difficilement pénétrable et pauvre en espèces végétales (richesse spécifique moyenne de 6.5 pour 4 relevés effectués en zone centrale du marais de l'Anglade) ; le Marisque (recouvrement moyen supérieur à 75%) est accompagné essentiellement du Phragmite {Phragmites australis} ainsi que de quelques espèces de mégaphorbiaie mésotrophe : Salicaire Lythrum salicaria, Lysimaque commune Lysimachia vulgaris et Euphorbe des marais Euphorbia palustris.

Le sol est constitué d'une couche de tourbe calcique dont l'épaisseur atteint plusieurs mètres à l'Anglade (moins épaisse dans le marais des Breuils) qui surmonte le substratum de calcaires crétacés. Le facteur mésologique fondamental est la présence durant la plus grande partie de l'année d'une nappe d'eau à très faibles fluctuations (les horizons supérieurs du profil sont encore spongieux et imbibés d'eau à la fin juillet) qui bloque la minéralisation de la matière organique.

Sur le site, la variabilité de l'habitat est marquée et dépend principalement de l'ancienneté de la cladiaie et de sa position dans la série dynamique de la végétation :

  • sur les parcelles qui faisaient encore récemment l'objet d'une fauche régulière pour la création de mares cynégétiques (chasse au gibier d'eau), les clairières recolonisées sont occupées par une cladiaie peu élevée et {{plus riche en espèces}} (moyenne de 17.5 espèces pour 2 relevés effectués en marais de l'Anglade) où subsistent encore diverses plantes du bas-marais alcalin initial ;
  • dans les secteurs plus anciens au contraire, la cladiaie se trouve en {{mosaïque avec des bosquets arbustifs}} dominés par la bourdaine Rhamnus frangula et/ou le Saule roux Salix atrocinerea.
  • Dans les prairies régulièrement exploitées du marais des Breuils, des taches de Marisque subsistent au sein de parcelles pâturées mais le cortège végétal y est tout différent par la présence de nombreuses plantes prairiales plus ou moins appétentes pour le bétail qui témoignent des efforts « d'amélioration » (fertilisants, drainage) effectués par les agriculteurs. Dans ces cas particuliers, on ne peut plus parler de cladiaie proprement dite mais de « prairies tourbeuses intensifiées ».

 

ESPECES INDICATRICES

Stades jeunes

Orchis des marais Orchis palustris, Ecuelle d'eau Hydrocotyle vulgaris, Choin noirâtre Schoenus nigricans, Oenanthe de Lachenal Oenanthe lachenalii, Jonc à fleurs obtuses Juncus subnodulosus ;

Stades matures

Marisque Cladium mariscus, Phragmite Phragmites australis, Euphorbe des marais Euphorbia palustris, Lysimaque commune Lysimachia vulgaris, Salicaire Lythrum salicaria, Gesse des marais Lathyrus palustris ;

Stades âgés

Bourdaine Frangula alnus, Saule roux Salix atrocinerea.

 

 Le marisque en fleurs (photo : J.Terrisse)

 

VALEUR BIOLOGIQUE ET ESPÈCES ASSOCIÉES

L'intérêt patrimonial de la cladiaie en tant que telle est élevé car il s'agit d'un habitat très localisé et en forte raréfaction partout en Europe.

Au niveau régional, la cladiaie du marais de l'Anglade possède un intérêt exceptionnel par son étendue (la plus vaste du Poitou-Charentes). Malgré sa dynamique très évoluée, elle héberge encore plusieurs espèces végétales précieuses : l'Euphorbe des marais Euphorbia palustris, la Grande douve Ranunculus lingua, la Gesse des marais Lathyrus palustris -  toutes 3 figurant sur le Livre Rouge  de la Flore Menacée de France - et la Laîche filiforme Carex lasiocarpa, protégée en région Poitou-Charentes.
Par ailleurs, les groupements liés dynamiquement à la cladiaie (stades régressifs) que sont le bas-marais et la tourbière initiale présentent également un intérêt considérable avec la présence d'espèces telles que : Gratiola officinalis, Orchis palustris, Carex serotina, Sonchus maritimus, Schoenoplectus tabernaemontani, Teucrium scordioides.

Sur le plan de la faune, la cladiaie possède également un intérêt considérable : comme habitat de prédilection pour quelques mollusques rares, comme site de nidification pour divers oiseaux menacés et comme site de frayère majeur.

 La Grande Douve, une plante de la famille des renoncules pouvant atteindre 1m de haut (Photo : J. Terrisse)

 

MENACES

Le drainage des zones humides, l'intensification agricole, l'eutrophisation des eaux, la modification du régime hydrique sont les principales menaces liées directement aux activités humaines. Le boisement de la cladiaie qui fait suite à son abandon est également très préjudiciable et peut entraîner en quelques décennies la disparition pure et simple de l'habitat sur un site. 

 

ÉLÉMENTS DE GESTION

Habitat dépendant étroitement d'une alimentation hydrique régulière (le Marisque ne tolère pas de battement de la nappe supérieur à 30cm) et très sensible à l'eutrophisation. Les modalités de gestion varient grandement en fonction des objectifs recherchés : une structure plutôt ouverte favorisera un cortège végétal diversifié alors qu'une cladiaie dense à forte accumulation de litière sera indispensable à la survie de certains mollusques rares. Lorsque la taille des sites le permet (cas du marais de l'Anglade), une gestion en mosaïque de secteurs différenciés permet de concilier des objectifs faune et flore apparemment contradictoires.

 

 

En savoir plus...

Fiche générique du Cahier d’Habitats National

 



Auteur : Jean Terrisse - LPO 2007
Crédit photographique : Emmanuelle CHAMPION, Jean TERRISSE
Cartographie SIG : Jean TERRISSE - LPO 2007